Dans les sous-sols d’un bâtiment du Au District de Munich prend désormais place un espace de travail côtoyant un lieu de vie quotidienne. Baptisé Industrial Office, ce projet porté par le cabinet Buero Wagner vient redéfinir les codes de l’espace de travail, répondant à la fois aux contraintes d’une ville en pleine expansion, et aux nécessités d’un lieu dédié à la productivité. Prisée mais limitée dans son développement urbain, la ville allemande oblige les architectes à repenser le préexistant pour développer de nouveaux lieux. Parmi les espaces sous-exploités, les sous-sols et garages de la ville trouvent une valeur nouvelle à travers le travail de designers et architectes à l’image de Buero Wagner. Dans le cadre du projet Industrial Office, l’objectif était avant tout l’agrandissement d’un espace de travail préexistant, conjugué à la présence d’un appartement lui étant adjacent. « Le projet a démarré en pleine pandémie, et la notion de fusion entre vie privée et vie professionnelle prenait une nouvelle dimension à l’époque. L’objectif était alors de créer un lieu mêlant ces deux fonctions, tout en les distinguant clairement, et en nous adaptant aux nombreuses contraintes inhérentes à cet espace », explique Fabian A. Wagner, à la tête du cabinet créatif en charge du projet. Parmi les nombreuses contraintes auxquelles il fait allusion, la principale réside dans l’impossibilité d’extension du bâtiment, nécessitant ainsi une exploitation totale de son sous-sol. L’espace est alors repensé dans sa totalité, en rapport avec l’appartement adjacent des propriétaires des bureaux. Un accès direct permet de relier les deux espaces, privés et professionnels, rendant possible une séparation stricte entre les deux lieux, ou à l’inverse permettant une fusion fluide, selon les désirs de leurs occupants. La seconde contrainte majeure résidait dans l’accès limité à la lumière naturelle, au sous-sol tout comme au premier niveau. Le bâtiment étant situé au fond d’une cour, les architectes se devaient alors de repenser ses différentes ouvertures. Une mezzanine reliant les deux niveaux est ainsi créée, tandis que des portes à la française viennent se développer sur les six mètres de hauteur du bâtiment.
La problématique de la lumière est résolue par la création de nouvelles percées, mais pas seulement. Face à cette contrainte, la matière joue un rôle de premier plan. La totalité de l’espace s’articule ainsi autour du métal dans ses diverses formes. Réfléchissant par nature, il réverbère la lumière, lui permettant de se diffuser avec plus d’aisance sur les deux étages. Des rideaux isolants en aluminium remplacent les murs, créant des séparations amovibles entre les espaces, tout en augmentant encore la réflexion lumineuse. « Une autre contrainte majeure nous a également orientés vers une certaine gamme de matériaux : un budget limité. Des matériaux non conventionnels, habituellement réservés à des espaces que l’on qualifierait d’industriels, se sont alors retrouvés au cœur du projet. Rideaux isolants, papier bulle, caillebotis galvanisés, acier galvanisé, chemins de câbles galvanisés et mousse composite recyclée, ont été réinterprétés pour trouver une nouvelle valeur dans le traitement choisi. Tous articulés autour de la notion de métal, ils ont fini par créer une palette monochromatique de “non-couleur”, servant à la fois les contraintes lumineuses, budgétaires, mais aussi l’esthétique des lieux. »
La quête d’harmonie de Buero Wagner les pousse également à imaginer la totalité du mobilier. Réalisé en caillebotis galvanisés à chaud et en acier galvanisé à chaud, d’un seul bloc et assemblés par soudure, il confère à l’espace une lisibilité découlant de la simplicité de la ligne et de l’absence du détail. Élément central du projet, la grille est sélectionnée pour les motifs qu’elle permet de projeter selon les jeux d’ombre et de lumière, venant se refléter sur l’unique élément organique de l’espace, le parquet en chêne. Un contraste discret, laissant toute la place aux nuances et reflets du métal.
Ce projet portait en lui un certain nombre de défis techniques, nous obligeant à repenser notre notion même de l’espace de travail et de vie quotidienne. Il s’inscrit dans le cadre d’une redéfinition des limites séparant ces deux univers. Nous avons dû trouver une manière de les compartimenter sans les rendre hermétiques l’un à l’autre, et en exploitant un espace habituellement non-
occupé, le sous-sol. La contrainte ici se présente alors comme un support à la réflexion dans la création de quelque chose de totalement différent, de totalement nouveau.
Oui, tout à fait. Nous avons toujours trouvé nos chantiers fascinants. Ici, les matériaux sont honnêtes dans leur forme, leur fonction et leur couleur d’origine. Bruts. Mais lorsque des matériaux banals et conventionnels, que l’on trouve habituellement sur les chantiers, sont pensés à travers un filtre créatif, ils reçoivent une nouvelle valeur grâce à leur traitement et à leur utilisation dans un contexte qui leur est étranger, et permettent de conférer à l’intérieur un caractère surprenant, presque temporaire. Cela mène, d’une part, à une nouvelle esthétique dans le traitement de nos bâtiments existants et, d’autre part, à une appropriation de l’espace « inachevé » en tant que tel.
Cette notion est centrale au moment de la sélection. Dans le cadre du projet
Industrial Office, elle s’est vue accompagnée par les autres contraintes mentionnées, mais le choix du métal est lui aussi très intéressant du point de vue de la durée de vie du mobilier et des nombreux éléments que nous avons intégrés dans l’espace. Ils sont très robustes et durables par leur résistance au temps. De plus, ce sont des matières qui permettent une réparation aisée en cas de casse.
Année : 2022
Adresse : Munich, Allemagne
Design d’espace : Buero Wagner
Matériaux : Métal, aluminium, rideaux
isolants, papier bulle, caillebotis galvanisés, acier galvanisé, chemins de câbles galvanisés et mousse composite recyclée