• Nikoline Dyrup Carlsen, Svend Jacob Pedersen et Malene Hvidt, fondateurs de Spacon & X • © Hedda Rysstad
Installé au cœur de Copenhague, Spacon & X fête aujourd’hui ses dix années d’existence. Réunissant un trio créatif composé de Nikoline Dyrup Carlsen, Svend Jacob Pedersen et Malene Hvidt, le studio innovant s’identifie par une approche pluridisciplinaire de ses projets. S’illustrant dans la création d’espaces pérennes, mais aussi de projets éphémères, il collabore avec des clients tels que Noma, Stine Goya, Hart Bakery, Rains, ou encore le restaurant étoilé AOC. Sa spécialité ? Le refus de se limiter. En effet, avec la création de Spacon & X naît ce désir de touche-à-tout, cette vague créative sans limite, rendue possible par les expériences passées de ce trio. Si Nikoline et Malene ont toutes les deux été formées à la profession d’architecte, Svend possède, lui, un background en design, communication visuelle et histoire de l’art. Des formations dans lesquelles ils ne s’enferment pas. Avant de lancer leur studio, ils évoluent dans l’univers de la mode pour Malene et Svend, tandis que Nikoline s’illustre comme professeure dans des institutions de renom, avant de co-créer l’école d’architecture ANARK. Dans les bureaux du studio, les disciplines se côtoient et se bousculent, venant brouiller les frontières les séparant pour entrer en parfaite osmose. Une unité qui se met au profit de projets complets, où architecture, design, objet, lumière et scénographie s’unissent au service de la création d’une identité marquée.
C’est par ce terme danois que Malene Hvidt, l’une des trois co-fondatrices de Spacon & X, définit l’approche plurielle du travail du trio. « Dès le départ nous avons décidé de toucher à tous les univers liés au design et à l’architecture. Nous créons des bâtiments, des intérieurs, des objets, mais nous travaillons aussi sur la lumière et bien d’autres domaines encore. Cette volonté de tout faire peut se définir par le terme gesamtkunstwerk qui porte en lui l’idée de la création d’espaces constitués d’éléments disparates, mais qui fonctionnent très bien entre eux. D’une certaine façon, nous pouvons comparer cela à une symphonie : des éléments qui s’ajoutent les uns aux autres pour finalement atteindre un équilibre parfait. Cette vision réclame une approche organique qui vient plus largement poser la question de ce que signifie créer un espace. Pour nous, il est question de la relation entre les objets et les matériaux, mais aussi de l’interaction du corps humain dans ces espaces, de l’atmosphère qu’ils génèrent. Notre approche pluridisciplinaire rend possible une compréhension totale dans nos projets » confie Malene. Un mélange des disciplines qui s’applique aussi bien dans leurs projets pérennes, à l’image du restaurant POPL Burger porté par Noma, que dans leurs projets éphémères tels que les différents fashion shows dont ils ont mené la direction artistique pour Stine Goya. Pour atteindre une cohérence parfaite, Spacon & X ne se contente donc pas d’imaginer l’espace, mais va plus loin en pensant des objets de mobilier qui viennent servir l’identité d’une marque et d’un projet. Parmi ces derniers, on remarque notamment la chaise It’s not a phase pensée pour la marque ROTATE. Faite d’acier inoxydable et décorée de piercings, mais dépourvue d’assise, elle se fait aujourd’hui leitmotiv, tel un fil conducteur à retrouver à différentes échelles dans les espaces de la marque de vêtements et d’accessoires danoise.
La question de la scénographie est centrale dans le travail de ce trio créatif qui collabore régulièrement avec des marques de vêtements danoises. Depuis plusieurs saisons, ils sont les têtes pensantes qui se cachent derrière les défilés de la marque Stine Goya. Événement temporaire par nature, les défilés ne durant qu’une quinzaine de minutes, la scénographie est tout aussi importante que la collection présentée. Comme nous l’explique Malene, ce caractère éphémère n’impacte cependant pas l’approche du studio. « Notre approche est la même que pour un projet qui est destiné à durer dans le temps. Nous cherchons à capter l’identité de la marque, dans le cas d’un défilé, l’identité de cette collection en particulier, et de la retranscrire dans la scénographie. Ici la seule différence est la nécessité de créer un momentum : comment rendre ces quinze minutes spéciales ? Au-delà de l’expérience qui sera vécue sur le moment par les spectateurs présents, il faut aussi garder à l’esprit la question de l’immortalisation. Nous vivons à l’ère du digital, penser un espace, pérenne ou éphémère, ne peut pas se faire sans prendre en compte le fait que la majorité des personnes vont d’abord faire l’expérience de l’espace par les réseaux sociaux. Elle doit donc pouvoir être ressentie par l’image également. » Parmi les projets que Malene utilise pour exemplifier cette démarche, le défilé Stine Goya SS23 dont le plateau était parsemé de colonnes de sable s’effondrant peu à peu durant la présentation. Les mannequins déambulaient alors autour de ces créations éphémères, conférant au défilé une expérience digne d’une performance, dont l’actrice principale était ici la matière.
Pour Spacon & X, la matérialité occupe une place centrale. Au-delà de ses qualités esthétiques, c’est une véritable réflexion sur son origine – la plus locale possible –, sa durabilité, mais aussi sa seconde vie. Ainsi, dans nombre des projets du studio, nous trouvons les matériaux dans leur forme la plus pure,
notamment lorsqu’il est question de projets scénographiques éphémères. Le sable utilisé pour le défilé Stine Goya a par exemple été donné à des parcs de jeux pour enfants, tandis qu’un projet de table monumentale réalisée en briques locales pour 3 Days of Design a par la suite été utilisé pour la construction. « La durabilité est au cœur de notre réflexion. Mais cette valeur ne vient en rien impacter la qualité esthétique du projet. Nous aimons travailler avec la matière pure. Ce que l’on perçoit au premier regard nous donne tout de suite une idée de la sensation tactile de la matière. Nous aimons cette honnêteté, qui est également une façon de mettre en valeur le matériau pour ce qu’il est, dans sa forme la plus brute, la plus pure. »