L’inspiration par la matière
L’histoire commence quand Jonathan Liang, directeur créatif de Bonia, appelle son ami Oskar Kohnen pour lui confier la conception du nouveau magasin phare de la marque. C’est à Kuala Lumpur en Malaisie que les 200 m2 de vente prennent place, au sein du centre commercial Suria KLCC au pied des plus hautes tours jumelles du monde, les fameuses tours Petronas qui culminent à 452 m de haut. Un projet en or pour l’architecte d’intérieur d’origine allemande basé à Londres, grand habitué des boutiques, hôtels et appartements en Europe, aux États-Unis et en Asie. Son mantra est de « repousser les limites traditionnelles de l’architecture et du design d’intérieur dans de nouvelles directions » en faisant appel aussi bien à l’imaginaire et au fantasme, qu’il travaille autant à partir de styles architecturaux éclectiques que de matériaux inattendus. Et c’est exactement ce qu’il a mis en pratique avec Bonia. Pour cette première collaboration avec la marque malaisienne d’accessoires de mode (sacs, chaussures, montres, lunettes, mais aussi arts de la table) créée en 1974, Oskar Kohnen imagine une boîte blanche contenant une multitude d’éléments architecturaux pour jouer avec l’imagination du visiteur. « Pour moi, le mélange des genres est l’expression naturelle de l’époque dans laquelle nous vivons. Nous n’avons plus un style de la décennie, comme c’était le cas dans les années 1980 ou 1990. Nous sommes dans un environnement visuellement sursaturé, où les références croisées et la dualité sont omniprésentes, alors j’aime en jouer dans mon design », explique le concepteur qui raffole de mobilier vintage au sein de volumes épurés et contemporains.
« Comme pour les fragmentsarchitecturaux contrastés, différentesesthétiques se combinent pourdonner un effet vivifiant »
Pour unifier cette pluralité de styles et d’éléments disparates, Oskar Kohnen compose une grande galerie d’exposition aux allures de musée. Mais plus que de vouloir transformer les articles en oeuvres d’art, c’est surtout l’occasion de « donner à chaque produit plus d’espace. Les niveaux de consommation sont si élevés aujourd’hui que la meilleure façon de réinventer Bonia est de présenter moins de marchandises, en veillant à ce que nous les voyions avec des yeux différents ». Et pour mettre en valeur chaque objet présenté, il fait appel à des artisans locaux. Un sol en terrazzo gris, un escalier abstrait en bois peint vert menthe – qui fait référence à la croissance de la marque –, une table en marbre noir et vert, un paravent courbe en teck qui ménage un coin à l’abri des regards ; autant d’artifices pour transformer l’espace en une véritable galerie à visiter. La disposition délibérément asymétrique encourage l’exploration ; « une riposte à l’uniformité sans intérêt des magasins répliqués », revendique le concepteur. Et il ne s’arrête pas là. Il allie également des niches organiques en plâtre qui révèlent quelques étagères, un coin salon à la fois douillet et luxueux signé Pierre Paulin, mais aussi une grille au plafond qui emprunte son style au design radical italien comme Superstudio, et qui projette une lumière rougeoyante unifiant tous les fragments dans cet espace décidément hors du temps. Sans oublier la façade en terre cuite émaillée produite au Portugal par Ceràmica Ferrés faisant référence à l’architecture moderniste asiatique. Finalement, une galerie qui marie héritage et expérience immersive.
Année : 2022
Adresse : Centre commercial Suria KLCC, Tours Petronas, Kuala Lumpur, Malaisie
Design d’espace : Oskar Kohnen – OK Studio
Matériaux : terrazzo, marbre, terre cuite,plâtre, bois, teck, laque
Surface : 200 m2
