L’essor de la laine française

Par Louise Conesa

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Si les matières synthétiques ont connu leurs heures de gloire il y a quelques années, la conscience écologique remet sur le devant de la scène des produits naturels et locaux, à l’image de la laine. Avec la création en 2009 de l’association Lainamac, un vivier d’artisans et de manufactures s’est constitué pour restructurer et soutenir la filière française. C’est à Felletin, célèbre berceau de la tapisserie d’Aubusson, qu’elle s’est installée pour mettre en oeuvre une série d’actions, allant de la formation professionnelle à l’accompagnement vers l’innovation responsable, en passant par la valorisation et la transmission des savoirs. Avec Oh my laine !, l’association complète son champ d’action. Chaque année, et cela depuis 2019, une sélection d’artisans et de marques émergentes est accompagnée et valorisée lors d’une exposition pendant la Paris
Design Week. À travers des pièces décoratives, les créateurs donnent à voir aux professionnels et aux amateurs les possibilités infinies du matériau. Épaulée d’un parrain, l’architecte d’intérieur et designer Sébastien
Caron, la 5e édition prouve à nouveau le dynamisme de la filière dont le rayonnement ne cesse de croître.

QUATRE QUESTIONS AU PARRAIN DE OH MY LAINE !, SÉBASTIEN CARON

Architecte d’intérieur et designer français, Sébastien Caron inaugure le rôle de parrain lors de l’édition 2023. Un statut qui lui tient à cœur pour exalter la filière laine française. Rencontre.

Comment avez-vous connu Lainamac ?
Travaillant sur des projets haut de gamme, j’ai été en contact avec Dominique Andreani, consultante en développement et passionnée d’artisanat français. Elle m’a alors évoqué l’association et leur événement Oh my laine !. Je m’y suis rendu en 2020, et depuis je ne rate plus aucune édition. J’ai de suite aimé découvrir le travail des artisans participants, discuter avec eux et voir leur évolution au fil du temps.
Puis en 2022, en échangeant avec Dominique sur la 5e édition, nous avons imaginé le statut du parrain pour accompagner les artisans tout au long de l’année. Et je suis honoré de tenir ce rôle cette année.

Qu’est-ce qui vous a plu dans l’événement ?
Nous utilisons la laine depuis des millénaires dans notre quotidien. Pourtant, nous ne connaissons qu’une infime partie de ses formes. Avec l’exposition Oh my laine !, Lainamac offre une redécouverte de la matière. À travers des savoir-faire uniques, renouvelés par la créativité des artistes et artisans participants.
Ce sont des ambassadeurs du « bien fait » qui anoblissent ce matériau simple et naturel, mais qui conservent la discrétion du compagnonnage. En les accompagnant lors de cette manifestation, Lainamac leur procure les outils pour se professionnaliser et pour mettre en avant cet artisanat français de manière nationale et internationale.

Quel est votre rôle au cours de l’édition ?
J’interviens dès le début en sélectionnant les participants. Puis tout au long de l’événement, je les conseille sur la création. Je prends le temps d’échanger avec les artisans pour les orienter au mieux dans leur réflexion. Étant architecte d’intérieur, je peux leur offrir un regard neuf afin de créer l’inattendu, la surprise. Oh my laine donne à voir de nouvelles applications de la matière aux professionnels, mais aussi à un plus large public. Il faut imaginer l’exposition des pièces comme une performance. La scénographie est d’ailleurs un point que nous aimerions développer pour les prochaines éditions.

Qu’attendez-vous des créateurs participants ?
Il est d’abord essentiel que les pièces reflètent la passion des artistes et artisans. Que l’on ressente leur plaisir à travailler cette matière. De cette façon, il est possible de sensibiliser le public à leurs techniques et leurs processus créatifs. Et puis Oh my laine ! se place progressivement comme un rendez-vous annuel autour de la laine. Il est important que les créateurs interpellent avec leur production. Et cette année, ce sera à nouveau le cas !

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CINQ CRÉATEURS À RETENIR DE L’ÉDITION 2023

Hanako Stubbe
C’est une expérience auprès de tisserands en Asie, qui change le regard d’Hanako Stubbe sur son travail. L’objet devient un vecteur de sentiments et d’histoires. Son désir de préserver les savoir-faire traditionnels va ainsi orienter sa création. Avec son studio de tissage haut de gamme, elle tisse des pièces sur mesure, mêlant des motifs graphiques et épurés aux techniques ancestrales. Pour Oh my laine !, ce sont trois oeuvres murales qu’elle expose. Des créations visuelles puissantes, qui révèlent la laine mérinos par des jeux de textures et de reliefs.

Claire Salin
Le mobilier de Claire Salin naît d’une volonté de remettre la nature au sein de l’habitat humain. Le bois sculpté de formes sobres devient l’ossature, tandis que la laine tricotée à la main apporte le confort de l’assise. Une association pleine de poésie, qui met en valeur des matières naturelles et régionales qu’elle prend le temps de sélectionner autour d’elle. Technique signature, elle le décline pour l’événement, sous la forme de paravents, de tabourets, de banquettes et même de tableaux. Autant de silhouettes qui confirment la diversité de la laine.

NME studio
Le sol français regorge de matières premières et c’est avec une vision responsable que le studio souhaite les mettre en avant. 100 % en fibres naturelles françaises, les tissus édités croisent durabilité, tradition et élégance. C’est un véritable cercle vertueux au sein de la décoration que le quatuor fondateur souhaite recréer. Pour en témoigner, les deux nouvelles créations présentées cette année. Une banquette en bois habillée d’un tweed et un tapis tufté créé avec les Ateliers Pinton. Leur innovation ? La teinture végétale, qui réunit les deux pièces, d’un nuancier rouge rosé, nommé Garance.

Julie Robert
Du tissage à la broderie en passant par sa spécialité, le punch needle, Julie Robert explore les techniques anciennes avec un regard actuel. C’est un voyage en Islande à la découverte du tissage contemporain qui l’entraîne vers cette nouvelle façon de créer : la recherche du volume, l’assemblage des matières tout en mêlant les procédés. Aujourd’hui, la designer textile ne se donne aucune limite, et compose dans son atelier des pièces uniques, faites de paysages laineux aux combinaisons surprenantes qu’elle décline sur des tableaux, des coussins et des lampes, présentés pendant l’exposition.

Laines Paysannes
De la tonte à la création finale, Laines Paysannes suit chaque étape de la production afin d’assurer une traçabilité exemplaire et être au plus proche des acteurs de cette filière locale. Dans leur atelier ariégeois, la laine est sélectionnée puis travaillée avec soin pour se transformer grâce à des gestes traditionnels en tapis au dessin moderne et à la qualité unique. Cette année, la marque surprend avec deux pièces inédites. Réalisées par la designer et tisserande Sarah Ho, l’une révélera des éléments en teinture végétale, tandis que l’autre mettra à l’honneur l’univers des graines grâce à des points texturés.