Pierre précieuse

Par Laurie Picout

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La pierre est un élément de construction depuis l’Antiquité. Très présente au sein du patrimoine français, mais délaissée depuis l’avènement du béton, elle revient sur le devant de la scène pour ses qualités techniques, esthétiques et durables. Le Fonds de dotation Verrecchia prône son retour en force aussi bien dans l’architecture que dans l’art.

Matériau patrimonial, la pierre de taille évoque églises et institutions historiques qui parsèment le territoire français. Mais elle est aussi une matière très performante dans le cadre de la transition énergétique. Alors, comment dépoussiérer cette image vieillotte et élitiste pour replacer la pierre dans le contexte actuel de la construction durable et accessible à tous ? Anastasia Andrieu s’y attelle quotidiennement. Elle dirige le Fonds de dotation Verrecchia, créé à la fin de l’année 2020 par le groupe de construction et de promotion spécialisé en logements collectifs en pierre de taille massive. Basé en Seine-Saint-Denis, il est l’un des seuls en France à utiliser non pas de la simple pierre agrafée, mais de vrais blocs en pleine masse pour bâtir ses immeubles urbains. Et comme pour respecter l’expression « d’une pierre deux coups », les objectifs du fonds de dotation se répartissent en deux principes : d’une part, la valorisation, la mise en lumière et la découverte des savoir-faire autour de la pierre de taille, et d’autre part, le fait de replacer la pierre comme matériau contemporain de construction, de création et d’expression.

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PIERRE ANGULAIRE



On le sait, la pierre comporte de nombreux avantages. Elle possède une grande valeur écologique, car elle est « géosourcée », donc issue des formations géologiques de surface, sans changement d’état physique (aucun traitement). Utilisée brute, la pierre ne subit aucune transformation énergivore et apporte un réel confort thermique sans isolation supplémentaire et une grande qualité acoustique aux espaces intérieurs. De plus, pour les chantiers franciliens, elle est locale, car extraite dans des carrières situées à Nogent-sur-Oise, à une cinquantaine de kilomètres de la capitale. Des qualités qui remettent la pierre massive au goût du jour dans les projets architecturaux, mais pas encore à grande échelle. Est-ce une raison économique ? Sûrement, puisque peu de constructeurs savent maîtriser la mise en oeuvre de cette matière. Un problème de filière ? Aussi, puisque le béton a remplacé les autres matériaux, pierre comme acier, dans les années 1950 lors de la reconstruction des villes détruites pendant la guerre. Son faible coût et sa facilité d’approvisionnement et de mise en oeuvre en ont fait un incontournable au détriment des savoir-faire traditionnels. Actuellement, les réglementations énergétiques font davantage la part belle au bois, un matériau biosourcé et renouvelable, facilement transportable et chaleureux. La filière pierre mériterait aujourd’hui plus de visibilité et de promotion

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APPORTER SA PIERRE À L’ÉDIFICE



Le Fonds de dotation Verrecchia assure cette visibilité et cette promotion de la matière pierre en s’appuyant sur trois territoires d’action. D’abord, le volet artistique avec des résidences organisées au château de La Maye à Versailles. Une vingtaine d’artistes (sculpteurs, designers, vidéastes ou encore danseurs) viennent découvrir la pierre sous une autre facette et sont assistés de Compagnons – tailleurs de pierres pour échanger autour de prismes et thématiques allant du son à l’architecture, en passant par le design culinaire, l’olfactif, le bois ou encore les matériaux innovants. Pour Anastasia Andrieu, cet « équilibre artiste-artisan est très touchant, car il génère des discussions incroyables entre l’artiste qui débride la technicité du Compagnon et le Compagnon qui
va transmettre des gestes précis à l’artiste ». Les Journées européennes du patrimoine sont alors l’occasion de présenter les travaux au grand public. Ensuite, le volet socioculturel transmet « les gestes et les messages » liés à la pierre à différents publics, en commençant par les enfants dès l’école élémentaire. Anastasia compte plus de 2 500 écoliers rencontrés au cours des trois dernières années à travers des ateliers d’initiation à la gravure sur pierre, ou encore des visites d’ateliers pour informer sur le métier de tailleur de pierre afin de générer des vocations. Enfin, le volet pédagogique via du soutien aux établissements (lycées professionnels, formations, etc.) avec des dons de matière et d’outils dans le but de moderniser les techniques et d’accompagner les jeunes vers le numérique. Des workshops sont aussi organisés dans des écoles d’architecture et d’ingénierie pour sensibiliser les étudiants à cette matière. « On se rend compte que la génération qui est en école aujourd’hui a beaucoup plus d’appétence pour le travail manuel et les métiers d’art, ce qui m’apparaît comme une prise de conscience générationnelle. Ce retour à la matérialité s’accompagne d’un retour au local, ce qui est très positif », s’enthousiasme Anastasia Andrieu.