Déformations, Black Hole, Samir Mazer, 2021 • © Alexis Frespuech
Du 21 au 25 mai 2025, la biennale Révélations investit la nef du Grand Palais pour une 7e édition qui affirme plus que jamais son rôle de vitrine incontournable des métiers d’art et de la création contemporaine.
Porté par Ateliers d’Art de France, l’événement fédère 559 créateurs de 35 pays, dans une scénographie épurée signée Adrien Gardère, où dialoguent innovation et transmission. Créateurs majeurs, talents émergents, manufactures d’excellence, galeries pointues et institutions emblématiques proposent un panorama marqué par la diversité et le renouveau des savoir-faire. Pour la première fois, les écoles intègrent cette sélection, témoignant d’une volonté forte de la biennale de cultiver l’avenir et d’offrir aux jeunes générations une visibilité inédite.
L’Italie, pays à l’honneur cette année, célèbre l’excellence de ses artisans et la richesse de son patrimoine vivant, du marbre de Carrare au verre de Murano. Entre héritage et réinterprétation, les savoir-faire italiens s’expriment avec audace, réaffirmant la porosité entre tradition et avant-garde.
Au cœur de cette édition, une sélection de créateurs se distingue par une approche singulière de la matière, à la croisée du design, de l’architecture et de l’art.
Lætitia Perrin, architecte et céramiste, redéfinit les contours du mobilier et de l’objet d’art à travers des formes libres et sculpturales. Installée aux Ateliers Diderot (Pantin), elle façonne la céramique comme un véritable matériau de construction, explorant les tensions entre lignes organiques et structures rigoureuses. À Révélations, elle dévoile Opus Incertum, un paravent en bois laqué ponctué d’inserts céramiques, conçu en collaboration avec Aurélie Rimbert. Cette pièce manifeste un dialogue entre densité et légèreté, qui se prolonge à travers une collection de tables, tabourets et bas-reliefs explorant la texture et le mouvement.
Duo incontournable du design textile, Lily Alcaraz et Léa Berlier repoussent les limites du tissage en l’élevant au rang d’expérience sculpturale. Lauréates des Grands Prix de la création de la Ville de Paris, elles déconstruisent la trame pour la recomposer en une matière vivante. Leur buffet, conçu avec Pierre Charrié et l’atelier d’ébénisterie Jean Brieuc Atelier, érige le tissage de bois en un véritable mécanisme générant une cinématique fluide et organique. Elles présentent également une installation murale où l’alternance de teintes crée un effet vibratoire, inspiré des mouvements marins. En jouant sur le contraste entre fixité et ondulation, elles livrent une vision immersive du textile, où chaque fibre devient vectrice d’émotion.
Depuis plus de vingt ans, Samir Mazer réinterprète l’art du zellige en lui insufflant une dynamique spatiale nouvelle. Entre géométrie architecturale et vibration sensorielle, il réinvente l’ancestrale tradition marocaine pour mieux la projeter vers de nouvelles perspectives. Ses créations métamorphosent les tesselles de terre cuite émaillée grâce à des volumes sculptés explorant la lumière et les reliefs. Avec sa collection Froisser ou plisser les murs, le zellige ne se contente plus d’habiller une surface mais la sculpte et la déploie en un mouvement presque organique, où chaque fragment résonne avec l’espace.
Fondateur du studio Tygre, Nicolas David inscrit la céramique dans une dimension contemplative et immersive. À la croisée de la sculpture et du design, ses pièces évoquent des paysages intérieurs, des refuges sensibles face à l’agitation du monde. Travaillant la terre avec une précision quasi architecturale, l’artisan façonne un dialogue subtil entre innovation et héritage, technique et poésie. Ses structures, à la fois épurées et organiques, captent la lumière et modulent l’espace, imposant la céramique comme un médium profondément sensoriel et émotionnel.
Le Studio Quiproquo, fondé en 2021 par les designers et artisans Marie Vernier-Lopin et Bastien Phung, s’attache à créer des objets narratifs qui interrogent nos usages et notre rapport aux savoir-faire. Au sein de l’espace dédié au Bureau du Design, de la Mode et des Métiers d’Art (BDMMA) de la Ville de Paris, ils présentent un miroir de la collection Étai, qui allie subtilement marbre et bois brûlé selon la technique japonaise du yakisugi. Avec cette série, ils questionnent la relation entre élément porteur et élément porté, réinventant des éléments architecturaux souvent perçus comme temporaires pour leur conférer une pérennité esthétique, tout en jouant avec les codes de l’architecture et des savoir-faire artisanaux. •